Lettre ouverte destinée à Jean-Noël Barrot, Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, signée par 174 associations de solidarité internationale, personnes salariées, bénévoles, volontaires, chercheurs et chercheuses, étudiantes et étudiants préoccupés par le projet de budget pour l’aide publique au développement en 2025.
Lettre ouverte destinée à Jean-Noël Barrot, Ministre de l'Europe et des Affaires étrangères
Monsieur le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères,
Nous, associations de solidarité internationale, personnes salariées, bénévoles, volontaires, chercheurs et chercheuses, étudiantes et étudiants préoccupés par l’avenir, Françaises et Français attachés aux valeurs de solidarité, sommes choqués par votre projet de budget pour l’aide publique au développement en 2025. S’il était adopté, il acterait une dynamique de repli sur soi et un abandon irresponsable de la solidarité internationale.
Les coupes d’une ampleur inédite que vous proposez – 2,1 milliards d’euros, soit près de 40 % du budget de l’aide publique au développement – remettent en cause l’accès à des droits fondamentaux : la santé, l’éducation, l’eau, l’alimentation, la protection sociale et la nutrition. Vous sacrifiez également le soutien indispensable aux droits humains, à la société civile et à la lutte contre les inégalités, notamment celles qui touchent les femmes, les filles et les personnes marginalisées. Vous tournez le dos aux engagements français face aux crises climatiques et humanitaires qui exigent une réponse urgente et ambitieuse.
L’aide publique au développement de la France participe aussi à son rayonnement à l’international. Elle fait la fierté de notre pays parce qu’elle repose sur un socle de valeurs chères aux Françaises et aux Français. Les projets des ONG, les infrastructures et les partenariats financés offrent une image positive et progressiste d’un pays engagé et à la hauteur des défis mondiaux. Enfin, elle participe également à sécuriser l’avenir des Françaises et Français. La paix et la construction d’une société durable ne peuvent en effet se concrétiser qu’à l’échelle mondiale.
Que restera-t-il de notre solidarité internationale après cet acharnement ? Alors que nous nous félicitions de la hausse de l’aide publique au développement entre 2017 et 2022, vous nous proposez un brutal retour en arrière. Les premières victimes de ces coupes budgétaires seront les millions de personnes vulnérables auprès desquelles nous agissons. Ce revirement historique aura également un impact direct sur le secteur associatif. Alors que nous agissons avec et au plus près des populations, nos organisations sont parmi les plus attaquées par les coupes budgétaires, à rebours des priorités de la Loi de programmation de 2021. Les conséquences s’annoncent élevées.
Ce choix budgétaire n’est pas seulement injuste et dangereux, il est irresponsable. Il compromet des décennies d’efforts pour placer la France parmi les pays leaders en matière de solidarité internationale. Pire encore, la suppression de l’affectation de la taxe sur les billets d’avion et de la taxe sur les transactions financières au Fonds de solidarité est une rupture inacceptable. Ces taxes, historiquement destinées à la solidarité internationale, incarnent un lien politique et direct entre les flux de la mondialisation et la réponse aux défis mondiaux.
Or, un autre budget est possible. Les associations ont œuvré avec votre gouvernement et les parlementaires à une hausse du barème de la taxe sur les billets d’avion et un relèvement du taux de 0,3 à 0,4 % de la taxe sur les transactions financières, soit des recettes supplémentaires estimées à 1,6 milliard d’euros pour des instruments destinés à soutenir la solidarité internationale.
C’est pourquoi nous vous appelons, Monsieur le Ministre, à tenir vos engagements et à prendre toute l’ampleur de votre responsabilité en maintenant des moyens suffisants pour la solidarité internationale. Le texte adopté au Sénat est un signal dangereux que nous ne pouvons nous résoudre d’accepter. Nous vous exhortons à revoir ce budget et à assumer la responsabilité qui incombe à la France sur la scène internationale en :
- Réduisant ces coupes drastiques et injustifiées dans l’aide publique au développement, qui mettent en péril les engagements de la France et les populations les plus vulnérables.
- Garantissant l’affectation des taxes sur les billets d’avion et les transactions financières au Fonds de solidarité pour le développement.